Le faucon de l'espoir

Commune dans nos campagnes, la crécerelle était en fort déclin dans les années 70. La disparition des biotopes et l’utilisation des pesticides ont lourdement impacté les populations à l’époque. Dans la plaine de la Broye, entre Thierrens et Avenches, les ornithologues connaissaient une douzaine de couples. Aujourd’hui, ils en suivent plus de 300 et baguent bon an, mal an, un millier de poussins.

L’arbre aux faucons

Dans le verger, le vieux cerisier mort est toujours sur pied. Il étend ses branches dénudées vers le ciel. Une invitation pour les oiseaux ! À quelques dizaines de mètres, un couple de faucons s’est installé dans l’épaisseur du mur de la vieille ferme. J’installe mon affût en face du cerisier, dans l’espoir de voir les oiseaux s’y poser. Mon attente est vite récompensée. Alors que le mâle revient de chasse avec un campagnol au bec, la femelle quitte le nid et le rejoint sur l’arbre. Affamée, elle saisit la proie et commence son repas avec avidité. J’ai vu juste, le vieux cerisier est utilisé comme relais et j’ai la chance d’y observer et d’y photographier les semaines suivantes accouplements, repas,  toilettes ou encore échanges de proies.

Dans l’intimité de la famille

A l’œuvre pour un travail photographique sur l’espèce dans le but de réaliser un livre, je souhaite dévoiler la vie intime de la famille au nid. C’est une opération délicate qui demande beaucoup de précautions. Il est exclu de prendre le moindre risque pour la nichée. Durant l’hiver, je modifie l’arrière de quatre sites ce qui me permettra de photographier sans le moindre dérangement la vie dans le nichoir.

Un chasseur éclectique et efficace

Figée sur le faîte d’une remise, la femelle scrute son territoire. Soudain elle plonge au sol avec rapidité et détermination. Je la devine à travers les grandes herbes, affairée. Je pense qu’elle a capturé une proie. Soudain, elle relève la tête et avale tout rond le reste d’un campagnol. Avec d’autres prédateurs, elle est le pire ennemi du rongeur. Les agriculteurs l’ont bien compris et apprécient sa présence qui freine la population du micromammifère.

Depuis la limitation de certains produits phytosanitaires et de pratiques moins intensives sur quelques parcelles (jachères florales, prairies à fauche tardive, etc.), la crécerelle trouve à manger même si les campagnols font défaut. Grandes sauterelles vertes, grillons et lézards tirent profit de ces conditions favorables et figurent au menu du faucon.

Dautre part, avec la complicité des agriculteurs, les ornithologues ont posé des centaines de nichoirs sur les bâtiments agricoles. Une aide essentielle pour le retour du rapace.

Fragile équilibre

Tout là-haut dans le ciel, l’alouette chante à tue-tête. C’est elle qui fait le printemps dans les champs. Hélas, l’espèce se porte mal et peine à survivre dans nos paysages cultivés. Que faire pour sauver l’alouette et rendre nos campagnes plus bruissantes de vie ? Le faucon nous montre la voie. Grâce à un dialogue respectueux entre scientifiques et agriculteurs, il est permis d’espérer.